Le Petit Prince en tenue d’apparat, Illustration du chapitre Ier

Les amateurs disent que c’est « La Joconde de Saint-Exupéry ». Avec son manteau rouge et vert d’eau, sa tignasse blonde ébouriffée, ses étoiles sur les épaulettes et son sabre à la main, le Petit Prince est connu de tous. « Voilà le meilleur portrait que, plus tard, j’ai réussi à faire de lui », écrira l’écrivain à son propos. Cette aquarelle originale, qui illustra le chapitre 1er, servit à illustrer la première publication du Petit Prince à New York (1943). Disparue des décennies durant, elle est montrée pour la première fois au public (avec d’autres aquarelles) au Musée des Arts Décoratifs à Paris (1).

On l’oublie souvent, mais c’est pendant son exil américain (1940-1943), qu’Antoine de Saint-Exupéry rédigea son chef-d’oeuvre. Quand il débarque à New York, l’aviateur est déjà un écrivain célèbre. A l’été 1942, tandis qu’il déjeune avec son éditeur américain, il griffonne sur sa nappe un petit bonhomme à la chevelure dorée et vêtu d’une écharpe volante. Cela fait dix ans déjà qu’il dessine ce petit garçon à l’allure touchant, sur ses manuscrits, ses lettres et nappes de restaurant. L’éditeur est intrigué : Pourquoi ne pas en faire le héros d’un conte de Noël pour égayer les enfants américains ? Lui suggère-t-il. L’écrivain accepte mais décide d’illustrer son oeuvre lui-même avec des crayons aquarelles. Poétique et philosophique, son conte met en scène un garçon en quête d’amitié. Parcourant l’univers, il fera la rencontre d’une galerie de personnages aux comportements aussi absurdes qu’étranges. A son récit, l’auteur mêle son propre vécu. Ainsi, la figure du renard fut inspiré par un fennec croisé dans le Sahara après que son avion s’y écrasa en 1935. Les baobabs sont, eux, un souvenir de ses vols au Sénégal. La rose capricieuse, dont le Petit Prince tombe amoureux, incarne Consuelo, avec qui l’écrivain vécut une passion amoureuse. Quant au Petit Prince, il est Saint-Exupéry lui-même. A travers son personnage, l’écrivain dévoile ses obsessions, s’interroge sur la fraternité des hommes, leur fragilité, le devenir de la Terre. 

The Little Prince paraîtra le 6 avril 1943 à New York, un an avant la mort de l’écrivain-aviateur, abattu en mer Méditerranée par un chasseur allemand de la Luftwaffe. A la Libération, la maison d’édition Gallimard voudra publier le conte, mais les aquarelles originales resteront introuvables ! Elle décide alors de copier les illustrations de la version américaine, non sans quelques infidélités. Ainsi, dans la version française, le Petit Prince porte-t-il un manteau bleu au lieu de vert. Et ce jusqu’en… 1999 ! En 2006, un coup de théâtre fait trembler le monde de l’édition. 63 ans après leur disparition, les mythiques aquarelles réapparaissent ! Le chauffeur et jardinier de Consuelo, José Martinez Fructuoso révèle les détenir. A la mort de Consuelo en 1979, ce dernier avait en effet hérité de ses biens comprenant notamment huit grandes malles. L’une d’elle, qui était restée close depuis la guerre, renfermait la totalité des aquarelles originales qui illustrèrent le conte, dont celle du Petit Prince. Celle-là même qui partit à la Jersey City Printing Compagny, l’imprimerie new-yorkaise, un jour de fin 1942.

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